Bref.
Il boude. Enfoncé dans le canapé, il ne bouge pas. La vraie de vraie bouderie. Visage fermé, regard noir, et moue… heu… comment dire ? Boudeuse. C’est le terme. Logique.
Elle le regarde en pliant le linge. Elle n’a pas tout suivi. Une fâcherie avec la grande sœur. Ou avec le grand frère. Ou avec les deux. Une histoire de billes. Ou de doudou. De petite voiture. D’intrusion non autorisée dans la chambre des plus grands. Allez savoir. Il paraît que ça n’est pas toujours simple d’être le petit dernier. Mouais. Ça a ses avantages aussi.
Elle a envie d’une cigarette. Tiens donc. Elle n’en fumera pas. Surtout ne pas balayer six mois d’abstinence d’un revers de main. Non mais oh ! Elle s’épluche une clémentine. Elle en propose un quartier à Baptiste. Fin de non-recevoir. Il boude toujours.
Lise débarque avec son cahier. Besoin d’une explication pour un problème de maths. Va
voir papa, ma puce, il bricole à la cave. Lise chipe un quartier de clémentine. C’est de bonne guerre. Hugo reste invisible. Il doit écouter son MP3. Il est grand, il faut bien que ça se sache. Début d’adolescence. Souvent il dit :
- Maman, tu m’saoules.
Et elle se retient de répondre :
- Et réciproquement, mon fils.
Mais ça n’est pas le sujet du moment. Elle a fini sa clémentine. Elle va s’assoir à côté de Baptiste. Il a quatre ans et demi, ça laisse un peu de temps avant l’adolescence. Ouf. Elle dit :
- Tu es triste ?
Il ne répond pas. Il fait mine de la taper. C’est fréquent. Cette fois il s’arrête avant. Il n’arrive pas à expliquer ses colères. Pas les mots pour ça. Il faut bien que ça sorte autrement. Il dit :
- Pas zentil, Hugo.
C’est déjà beaucoup. Parfois il ne dit rien du tout. Elle le prend contre elle. Elle n’en saura pas plus. Si elle insiste, elle appuiera sur l’impuissance de son petit. Elle se tait. Elle le berce un peu. Elle pense à ces foutues otites qui ont pourri la santé de Baptiste quand il était plus petit. C’est fini, maintenant. Il entend bien. Est en pleine forme. Mais il parle mal. Ne comprend pas
toujours tout. Son instit aussi le dit.
Elle allume l’ordi. Elle veut lui mettre le clip des « aristochats », il adore. Ça devrait le calmer. Il s’emballe. Elle dit :
- Attend, je règle l’écran!
Baptiste répond :
- Qui, grand, maman ?
Elle soupire. Elle aimerait que son petit s’épanouisse, grandisse, qu’il communique et qu’il parle mieux.
Bref.
Elle a besoin d’un orthophoniste.
Décret numéro 2002 721 du 2 mai 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'orthophoniste
Art. 3. L'orthophoniste est habilité à accomplir les actes suivants: la rééducation des troubles de l'articulation, de la parole ou du langage oral quelle qu'en soit l'origine.